Je vous ai proposé au mois de Juin une nouvelle histoire appelée Au-delà, je vous invite à découvrir le premier chapitre de ce roman appelé provisoirement et sobrement Le livre.
Pour celles et ceux qui ont suivi les premiers chapitres d'Au-delà, je les rassure, ce projet n'est pas abandonné.
Simplement, vu que c'est un livre ambitieux qui sera plus chronophage que les trois autres précédents, et vu que manifestement il n'a pas remporté votre totale adhésion, je me réserve la possibilité de le poursuivre un peu plus tard.
Et puis depuis quelques temps j'avais une nouvelle histoire qui me trottait dans la tête, j'ai eu envie de commencer à la mettre par écrit.
Voici le résumé dont la tournure ressemble, et c'est volontaire, à celui de CTRL ALT SUPPR :
Deux adolescents reçoivent en cadeau un vieux livre d’un inconnu, voilà une intrigue des plus quelconques. Sauf que le bouquin se révèle posséder des facultés disons hors normes, on peut du coup légitimement penser que l’on ne va pas s’ennuyer à la découverte de cette aventure, non ? Ce qui est sûr c’est que vous n’ouvrirez plus jamais un livre de la même manière, vraiment plus.
Voilà, vous savez tout, si le cœur vous en dit je vous laisse découvrir les deux principaux personnages qui vont vous accompagner durant cette aventure :
***
Chapitre 1 : Un drôle de cadeau.
3°C !
Oui, ce n’était pas une température adéquate pour mettre le nez dehors en ce mois de décembre, je vous l’accorde. Sauf que mon amie Louise et moi étions du genre barrés, si, si, je n’ai pas peur de l’avouer.
Nous nous promenions nonchalamment ce jour-là dans les ruelles du village qui nous avait vus naître et l’on peut dire que nous faisions tout notre possible pour nous faire remarquer.
Et c’était facile en fait. Nous étions (très) légèrement vêtus, ignorant ostensiblement le froid glacial, ce qui avait pour conséquence d’attirer l’attention des passants que nous croisions qui se retournaient quasi systématiquement; nous adorions cela, et le mot est faible.
Si vous cherchiez une explication à ce comportement singulier, je peux déjà vous en proposer une, ma jeunesse, 15 ans presque 16.
Et si vous étiez curieux et en cherchiez une seconde, je vous dirais que Louise avait le même âge que moi, ou pour être tout à fait exact, avait déjà, elle, franchi la 16ème année.
Cette dernière était la plus délurée de nous deux, il est vrai que sa longue chevelure blonde, son visage d’ange et un physique avantageux lui permettaient une certaine impertinence qui lui allait à ravir.
Il est aussi vrai que son mètre quatre-vingt-dix mettait rapidement fin à toutes situations potentiellement délicates et lui donnait une indécente assurance.
Je m’étais résigné à être définitivement le plus petit des deux avec mon mètre soixante-quinze, mon médecin me jurait régulièrement que ma croissance n’était pas terminée. Il était confiant l’imbécile, je ne partageais pas son optimisme.
Après, je dois le dire humblement, j’étais beau gosse. Et ne croyez pas que je me vante, j’avais déjà été repéré par une agence parisienne, mais je n’avais pas donné suite, persuadé que je ne saurais m’adapter à l’évidente discipline que demandait le métier.
Quoiqu’il en soit, cette troisième journée de vacances scolaires promettait d’être aussi ennuyeuse que les précédentes. C’est sans grand entrain que nous nous sommes postés, comme à notre habitude, à 11h pétantes, devant l’unique fontaine du village à la recherche d’un mauvais coup à faire, d’une distraction quoi.
Oui, je peux vous l’avouer maintenant, l’ennui n’est pas une très bonne conseillère pour des adolescents un peu paumés. Et ne croyez pas que je sois dur avec nous-mêmes, les quelques vols et détériorations que nous avions commis ces deux dernières années pouvaient en attester.
L’ironie de l’histoire est que nous nous sommes rencontrés il y a trois mois, un jour de malchance à la Gendarmerie Locale, et je ne sais pas si cela provenait de notre pedigree commun – nous avions fait une bêtise le même jour, dans le même village, et quasiment à la même heure – mais le courant était passé tout de suite, et nous traînons ensemble depuis.
Nous attendions donc le prochain pigeon à qui nous allions faire des misères. La cible idéale se présenta aux alentours de 13 heures. La magnifique Audi noire et rutilante, immatriculée en Auvergne (le malheureux…) se gara non loin de nous.
Un vieux monsieur, sans défense j’allais dire, sortit péniblement du luxueux véhicule, Louise était déjà dans les starting-blocks, le sourire aux lèvres, je décidai alors de tempérer la demoiselle.
- Calme-toi, Lou ! (oui, c’était son diminutif). Il tient à peine debout il ne risque pas de nous échapper.
Elle me répondit sarcastique :
- Tu vas pas me saouler Gabi (c’est le diminutif de Gabriel…). Je vois bien qu’il est vieux, mais je veux m’en occuper avant qu’il entre dans une boutique.
Elle n’avait pas tout à fait tort, les premiers magasins étaient à une poignée de mètres, et le retraité gambadait plutôt vite pour son âge avancé.
L’arnaque que nous avions montée avait fait ses preuves, nous nous approchâmes donc du vieux monsieur confiant. Je m’adressai alors à lui concentré et autoritaire :
- Bonjour Monsieur, je vois que vous n’avez pas réglé le parking. Je vous remercie de vous acquitter du forfait journalier au plus vite.
La personnage âgée se retourna, mais ne manifesta pas l’habituel étonnement auquel nous étions habitués. L’effet de surprise ne fut pas notre allié ce jour-là.
Il nous répondit avec un sourire marqué et un regard perçant :
- Ah bon, c’est payant ? Et depuis quand les amis ?
Je sentais Louise commencer à bouillonner, elle n’avait pas l’habitude que la proie résiste.
Je dois dire que notre arnaque était bien rodée et que nous avions habituellement beaucoup d’aplomb. Mais ce monsieur en apparence si fragile, dégageait une certaine force ou vitalité, je ne saurais pas comme le décrire, mais pour tout dire, il m’impressionnait.
Je tentai de poursuivre le mode opératoire préétabli par nos soins tout en sentant mon assurance fondre comme neige au soleil.
- Euh, ben oui, c’est payant depuis cet été. Cela a été voté au Conseil Municipal.
Il se mit à rire de bon cœur. Et je dois dire que c’était très communicatif, j’eus toutes les peines du monde à ne pas le suivre. Pour ce qui est de Louise, la situation était plus simple à gérer; à mon grand désespoir elle n’avait pas d’humour.
Il s’arrêta soudain de rire et me regarda droit dans les yeux ignorant ostensiblement mon acolyte et me répondit d’un ton assuré à la limite de l’agressivité tout en se rapprochant de moi :
- Tu n’as pas de chance petit, j’étais présent au dernier conseil, et il n’a jamais été question de racketter les touristes, si tu vois ce que je veux dire…
Il m’avait tutoyé avec une aisance incroyable. Il était clair qu’il avait reniflé l’arnaque, et le fait que la rue était déserte à ce moment et qu’il faisait face à deux adolescents menaçants ne l’inquiétait pas plus que cela.
Nous n’avions pas envisagé ce cas de figure dans notre scénario, et il était clair qu’aussi déterminés que nous étions, ce monsieur d’un âge respectable ne risquait rien. Nous étions barrés et irrespectueux, mais nous n’aurions pas fait de mal à une mouche.
Louise devinant ma peur, décida de prendre le relais, elle n’avait pas froid aux yeux et un culot à toute épreuve.
Elle s’adressa donc à notre pseudo victime en ces termes peu élogieux :
- Dis grand père, arrête de causer tu me fatigues. Le parking se paie à la journée, c’est comme ça et pas autrement. Aboule les quinze euros, on n’a pas que ça à faire.
Le contrevenant répondit alors en arborant un air improbable et victorieux :
- Oui, tu as raison je cause, mais ce n’est pas ton cas…
Louise n’était pas du genre à s’éterniser, mais elle fut contre toute attente piquée par la curiosité. Elle demanda alors en le vouvoyant, signe que l’ascendant avait changé de camp :
- Que voulez-vous dire par là ?
- Eh bien c’est simple ! Causer, c’est parler en gardant une disposition à écouter. Et manifestement tu ne m’écoutes pas. Tu ne dois pas ouvrir souvent un livre, ça c’est certain ! Je vais donc parler dans ta langue : je ne paierai rien, nada, tu peux toujours rêver ma petite !
L’aplomb de l’homme augmentait de minute en minute, la situation nous échappait et j’entrevoyais déjà la venue des gendarmes et ses conséquences sur les sursis qui pesaient sur nos têtes…
Je m’attendais à ce que Louise monte alors comme d’habitude dans les tours, elle était coutumière du fait, mais cela ne se produisit pas. Elle était devenue muette, une fois n’était pas coutume, surprise par la fermeté de l’agressé.
La situation n’était pas reluisante, mais j’avais compris que nous étions face à quelqu’un d’intelligent, mais pas dangereux en ce sens qu’il n’avait pas tenté d’ameuter toute la rue, ni d’appeler des secours.
Je décidai donc de battre en retraite et lui expliquai en adoptant l’intonation de la repentance :
- Excusez-nous de vous avoir importuné.
Il sourit à nouveau et d’un ton plus posé me répondit :
- Tu t’exprimes mieux que la demoiselle, tu dois lire plus souvent.
J’étais en train de me dire qu’il devait être libraire par le passé quand il poursuivit :
- Pouvez-vous me rendre un service ? Si vous acceptez nous serons quittes.
L’homme nous proposait manifestement une porte de sortie, je lui répondis soulagé :
- Oui, bien sûr.
Il me tendit alors un vieux livre très endommagé tout en m’expliquant :
- Acceptez tous les deux ce livre, il vous sera très utile, vous pouvez me croire.
Je m’attendais à ce que Louise hurle en entendant la provocation à peine voilée, mais là encore et à mon grand étonnement elle n’en fit rien, toujours sous l’effet de la surprise.
On pouvait lire sur la couverture CE QUE JE SAIS C’EST QUE JE NE SAIS RIEN.
Je le parcourus rapidement en me disant que c’était écrit en tout petit, qu’il n’y avait pas d’illustrations et qu’il y avait peu de chance que je le lise…
Le vieil homme sembla satisfait de mon apparente curiosité, et contre toute attente, remonta dans son véhicule et partit en moins de temps qu'on peut le dire.
Nous nous sommes retrouvés tout penauds devant cette place de parking désormais vide.
Louise m’arracha alors le vieil ouvrage des mains tout en me criant :
- Putain, la vielle loque nous a bien eus ! Pufff, t’as vraiment pas assuré !
Je ne pris pas la peine de lui répondre, nous avions trouvé plus fort que nous, il fallait le reconnaître, on ne pouvait pas gagner à tous les coups.
Je commençais à repartir, déçu, abattu, mais songeur, quand ma compagne de galère me hurla :
- Merde alors, il est vide le bouquin ! Je comprends rien !
Je lui arrachai à mon tour des mains le fameux livre, et constatai l’incroyable : toutes les pages étaient désormais blanches !
***
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Christophe, Administrateur